La gravure à l’eau-forte : une alchimie artistique
Gravure à l’eau-forte, à pointe sèche, linogravure, blockprint… avant d’ouvrir Galerie Marguerite, ces mots m’étaient familiers, mais j’aurais été bien incapable d’en expliquer les sens précis, les spécificités et surtout les techniques correspondantes. Notamment, le terme « eau-forte » évoquait pour moi des tableaux un peu tristes et désuets, (trop) classiquement encadrés. D’ailleurs, l’offre de Galerie Marguerite était plutôt tournée vers la céramique, avec quelques artistes de l’image, mais plutôt des dessinatrices et peintres.
De la céramique à la gravure, un chemin inattendu
Au fil des rencontres, et là encore principalement parce que j’ai été éblouie par certaines œuvres et certains univers d’artistes, je me suis intéressée à ce métier d’art. J’ai eu envie de faire entrer des gravures dans l’offre de Galerie Marguerite. L’arrivée de ces artistes m’a permis, là aussi au fil des visites d’ateliers, de comprendre les principes de ces savoir-faire, d’arriver à les distinguer et de pouvoirles expliquer. Cela au moins dans les grandes lignes ;-). J’ai également eu la joie de pouvoir partager ces connaissances avec les clients de la galerie, très souvent curieux de connaître et comprendre les processus de création des œuvres.
Dans l’univers de Galerie Marguerite, la gravure maintenant très bien représentée, puisque 6 artistes pratiquent cette discipline. Presque autant que les céramistes ! Parmi les différentes techniques, l’eau-forte tient une grande place. Mais en fait, qu’est-ce qu’une eau-forte ? Je vous propose un petit plongeon dans cette technique pour en comprendre les origines, le processus et les spécificités.
Comment la technique de la gravure a-t-elle vu le jour ?
La volonté de reproduire des dessins ou des images a été un moteur essentiel derrière le développement de la technique de l’eau-forte. À l’époque de son émergence en Europe au XVe siècle, cette technique offrait une nouvelle façon de reproduire des dessins avec une fidélité et une précision remarquables, permettant ainsi de diffuser l’art sur une plus grande échelle. Cette capacité de reproduction a contribué à populariser la gravure comme un moyen d’expression artistique accessible à un public plus large, tout en préservant l’intégrité et la qualité des œuvres originales.
Reproductions ou œuvres originales ?
Cependant, les œuvres réalisées en gravure sont bien plus que de simples reproductions. Surtout aujourd’hui, où les techniques d’impression et de reproduction se sont grandement développées et ne nécessitent plus de passer par des procédés de gravure longs et complexes. La gravure est une technique artistique à part entière. D’ailleurs, chaque tirage est numéroté et signé, et les exemplaires tirés d’une plaque sont limités. Chez Galerie Marguerite, les séries peuvent aller d’une vingtaine d’exemplaires pour les gravures de Sayaka Abe, d’une cinquantaine pour celles de Fany Perret ou de Jeanne Picq. Certaines gravures sont également des tirages uniques : des monotypes. Ces tirages sont considérés comme uniques car de petites (ou grandes) variations de couleur en font des œuvres différentes les unes des autres.
Comment réalise-t-on une gravure à l’eau forte ?
Le processus de création d’une eau-forte commence par l’application d’une fine couche de vernis sur toute la surface d’une plaque métallique, généralement en cuivre. Cette couche de vernis protège les zones qui ne seront pas gravées. Ensuite, l’artiste dessine son motif à l’aide d’une pointe ou d’un burin, découvrant ainsi les parties à graver. Une fois le dessin réalisé, la plaque est plongée dans un bain d’acide qui mord les lignes exposées, créant des creux qui retiendront l’encre lors de l’impression. C’est l’usage de l’acide qui a donné son nom à cette technique … Plusieurs bains et un minutieux travail de nettoyage sont souvent nécessaires pour obtenir le résultat souhaité. La plaque est ensuite encrée, les zones en surface sont essuyées, laissant l’encre se loger dans les creux. Puis elle est pressée sur le papier pour révéler l’œuvre finale. Parfois, après le séchage, les artistes ajoutent quelques touches d’aquarelle ou de petits collages. Ensuite, c’est le moment de l’encadrement !
Couleurs et gaité sont bien là !
Je voudrais dire un mot sur la couleur en gravure, car cela a été pour moi une grande découverte. Longtemps, pour moi, une gravure, c’était une sorte de dessin aux tons sombres et aux thèmes mélancoliques ou sévères. Mais dans la gravure contemporaine, ce n’est plus le cas. Les artistes exploitent cette technique pour y insuffler lumière, et couleur. Il suffit de voir les encres vives et si gaies des eaux-fortes de Fany Perret pour s’en convaincre ! Ou de regarder les gravures pleines d’humour et de merveilleux des œuvres de Jeanne Picq. Ou encore de s’émerveiller devant les charmantes vues de Paris de Sayaka Abe. riches en détails colorés et clins d’œil. Et c’est également le cas des autre techniques de gravures : la couleur et la joie sont bien là !
En quoi l’eau-forte se distingue-t-elle des autres techniques de gravure ?
Bien que partageant des similitudes dans leur pratique, l’eau-forte se distingue de la pointe sèche, de la linogravure et du blockprint principalement par l’utilisation de l’acide. La pointe sèche grave directement sur la plaque les lignes du dessin. La linogravure et le blockprint également, mais en relief. On évide les parties qui ne font pas partie du dessin, formant des matrices qui prennent la forme de « tampons ». En termes de résultat, la pointe sèche crée des lignes nettes et précises. L’eau-forte permet une plus grande liberté de mouvement. Elle permet des traits fluides et organiques, et offre la possibilité de capturer des détails et nuances complexes. Mais ces autres techniques de gravure ont aussi leurs qualités, en termes de réalisation et d’expression artistique. On verra cela dans un prochain article !
J’espère que cette petite présentation de la gravure à l’eau forte vous aura intéressés et éclairés. Si vous avez des questions sur certains aspects évoqué (ou pas) dans cet article, envoyez moi un courriel. J’écrirai dans les prochaines semaines des articles complémentaires détaillant les autres techniques de gravure. Si cela vous intéresse, bien sûr !